Merci de noter: en droit européen, toute œuvre créée et publiée sur Internet étant couverte par le droit d’auteur, l’utilisation de cet article doit être autorisée.
*******
Au Théâtre de l’Œuvre, Paris 9ème.
Justice, est une pièce qu’on pourrait dire de théâtre documentaire. Pièce brillante: texte percutant de Samantha Markowic, mise en scène rythmée et précise, belle interprétation.
Salomé Lelouch, la metteuse en scène, explique en interview vouloir rendre compte d’une justice de pauvres pour les pauvres, d’un système judiciaire qui n’a pas le temps, et qui va très vite.
La pièce raconte, sur une scène de théâtre, le sort de gens qui ont été pris en flagrant délit de transgression de la loi, et que d’autres viennent interroger, juger, ou aider (les avocats) …
Justice raconte des comparutions immédiates, des moments où la personne déférée se trouve face à un substitut du procureur, qui va décider s’il va être jugé tout de suite ou plus tard. Cette pièce montre un enjeu très fort d’humain à humain. elle est comme une reconstitution théâtrale de l’appareil judiciaire.
Ce sont des gens qui dérapent parce que ce sont des gens qui sont ‘victimes de la vie’, non pas du système judiciaire, poursuit Salomé Lelouch. On n’est pas en train de raconter une justice qui fait mal son travail mais une humanité qui se retrouve face à la justice pour des raisons très injustes de la vie. Et ce message aurait été, dit-elle, bien plus difficile à faire passer avec des violeurs ou des assassins.
On raconte une humanité qui se retrouve face à la justice pour des raisons injustes de la vie.
Le soir du 26 janvier dernier, j’étais au Théâtre de l’Œuvre : Naidra Ayadi, Fatima N’Doye, et Océane Rosemarie jouaient.
Six comédiennes jouent Justice en alternance. Elles échangent tour à tour les rôles des justiciables, et de ceux qui représentent ou assistent la justice : ici ce sont les substituts du procureur, les avocats… Elles échangent les rôles d’hommes et de femmes, jeunes et vieux… Elles se fondent souplement d’un rôle à l’autre, sans changement de costumes, rien que par la mise en scène et leurs très grands talents d’actrices.
Cette pièce donne la parole, pendant une heure et quart, aux acteurs de cette justice et aux déférés, comme l’exprime la comédienne Camille Chamoux. Du temps de parole, et aussi du temps de compréhension. Il y a une justice à grande vitesse dans notre pays, et cette justice touche les gens qui n’ont jamais la parole: les délinquants, la petite misère. Sans pour autant faire des agresseurs, des victimes.
Parmi ces petits justiciables, Sabrina Mallard ouvre le bal, et son histoire reste en filigrane dans la pièce; on en ré-entendra quelque chose à la fin. Sabrina a été agressée dans la rue et porte plainte contre un certain Mohammed Ali, dont l’audition suivra. Puis une série de vignettes de justice, illustrent la comparution immédiate de petits délinquants, justiciables plus ou moins victimes eux aussi.
Justice à mille visages, tantôt laxiste, indifférente, cruelle… et très paperassière ; on se noie dans la paperasse; ils peuvent être nous, et nous pouvons être eux; ces gens sont victimes de la vie, et non victimes de le justice.
Salomé Lelouch elle-même dit avoir changé son regard après avoir vu la pièce. Désormais dit-elle, je réfléchirai à deux fois avant de porter plainte ou ne pas porter plainte… Je pense qu’il y a quelque chose qui a profondément changé en moi.

Cela me fait beaucoup penser au travail conduit par Raymond depardon: délits flagrants etc. Merci pour ce partage…
J’aimeJ’aime
Oui, tout à fait, on pense au travail de Raymond DEPARDON, dont le dernier film « Douze jours » était formidable! Merci pour votre intérêt!
J’aimeJ’aime