Lectures 2025
C’est bien une idée de môme ça, s’inquiéter de briser le cœur de quelqu’un.
(bandeau)
Marie Vingtras a publié en 2021 aux Éditions de l’Olivier: Blizzard, un remarquable premier roman. En voici la présentation par l’éditeur:
Le blizzard fait rage en Alaska.
Au cœur de la tempête, un jeune garçon disparaît. Il n’aura fallu que quelques secondes, le temps de refaire ses lacets, pour que Bess lâche la main de l’enfant et le perde de vue. Elle se lance à sa recherche, suivie de près par les rares habitants de ce bout du monde. Une course effrénée contre la mort s’engage alors, où la destinée de chacun, face aux éléments, se dévoile.
Avec ce huis-clos en pleine nature, Marie Vingtras, d’une écriture incisive, s’attache à l’intimité de ses personnages, et, tout en finesse, révèle les tourments de leur âme.
Et quelques extraits, subjectivement choisis, concernant la guerre…
Je ne propose pas de passages décrivant la survie dans cette contrée hostile, familière aux personnages, ni de scènes montrant l’exacerbation de leurs sentiments. Ils sont très peu, leur solitude est immense, et leur survie sans cesse menacée par la férocité des éléments ou les délires humains. Mais ils sont là, presque tous, pour de bonnes raisons – et parfois ils déraisonnent.
Seuls les purs…
Mon sur-titre à ces extraits: Avez-vous une idée de ce qu’est vraiment la guerre??
Freeman, ancien soldat au Vietnam:
Ma vie a vraiment changé quand j’ai été appelé pour combattre au Vietnam. J’avais le profil pour y être envoyé, disaient mes sœurs, trop pauvre pour pouvoir refuser, trop stupide pour me rebeller (…) Évidemment, je ne savais pas ce que cela impliquait de devenir un soldat, j’avais une idée si lointaine de la violence. Il faut me voir sur la photo de mes dix-neuf ans, tout sourire, comme un jeune homme à peine sorti de l’enfance.
p.57
Leslie, le fils unique de Freeman et Martha, s’est engagé dans l’armée:
Je craignais qu’il n’ait juste été envoyé en enfer lui aussi, mais je ne disais rien. Ce n’était pas la même époque ni le même décor, les conflits étaient moins meurtriers pour les soldats. Mais, quelle que soit la technologie utilisée, l’homme trouvera toujours un moyen inédit de blesser, de trancher, d’amputer ses frères (…) La guerre reste la guerre. Elle est terrible et galvanise en même temps (…) Il y a toujours une bonne raison pour justifier que nos enfants se fassent sauter sur des mines, pour qu’ils reviennent écharpés, silencieux comme des ombres, incapables de mettre des mots sur ce qu’ils ont vu.
p.120
Un autre thème dans ce roman: la fuite.
Fuir l’Alaska, fuir sa famille:
Plutôt qu’une fuite, Thomas voulait des images nouvelles, des paysages jamais vus auparavant, pour offrir à son esprit un succédané du premier plaisir, quelque chose qui pourrait remplir l’espace libre avec tant de force que le reste, le sombre, tout ce que la vie avait d’odieux se trouverait confiné dans un coin, terrassé par le beau.
p.102
